Deuxième lecture :
“Yèku Mèdji
Celui que nous accusons est innocent.
Suspectons l’inconnu si c’est nécessaire.
La malotrue n’est pas celle qu’on attend.
N’amplifions pas notre malheur.
Ce sort surprend celui qui le porte.
Au bord du fleuve de la Vie, ces noms ont rendu visite à Ari Ku Masa.
Celui qui attend la mort, la rencontre partout.
Il s’empêche de voir la vie à côté de lui.
Masa écoute Yèku Mèdji chantant :
‘Ton frère est un piroguier.
Il habite là-bas,
Sous la paillote là-bas
Sur l’autre rive.
Tu l’attends.
Il ne vient pas.
Tu l’attends.
Ton frère le piroguier ne vient pas.
Des lustres,
Tu l’attends.
Le fleuve est là.
Tu es là.
D’autres semblables,
Hommes, femmes, enfants,
Jeunes et vieux viennent.
Ils te regardent.
Ils te dépassent.
Ils passent.
Tu es là.
Ils sautent.
Ils courent.
Ils marchent.
Tu es là.
Ils nagent.
Ils rament.
Ils se transportent.
Tu es là.
Ils atteignent là-bas
La paillote là-bas
Sur l’autre rive.
Tu es là.
Tu attends ton frère, le piroguier.
Ta tête et ton corps ont blanchi.
Tu ploies et tu attends.
Des heures ont sonné.
Le temps s’est écoulé.
Des bacs ont levé le voile.
Tu attends.
Un jour, celui qui n’attend pas viendra te voir.
Il t’amènera chez ton frère.
Ton frère ne te reconnaitra pas.
Toi aussi,
Tu ne reconnaitras pas ton frère.
Celui qui n’attend pas te ramènera sur tes pas.
De nouveaux visages passeront et repasseront devant toi.
Toi, tu attendras ton frère le piroguier.'”
Extrait du Livre de Cham
