Troisième apologie : La Porte
Dans une antichambre de la forêt sacrée, le Guide se charge de planter le décor matériel et spirituel de la cérémonie. Le décor n’est simple qu’en apparence. Le vide, le néant, les objets ordinaires ou sacralisés, la lumière, les ombres, tout ce qui le compose, visible ou invisible, parle, signifie et cache. La Vérité occupe tout le décor. Elle le remplit. Elle participe à une dramaturgie à la fois obscure et lumineuse. La nature est là, silencieuse mais présente par tout ce qu’elle contient. L’homme, plus actif que jamais, passe et repasse avec les costumes de son mystère. La neutralité du lieu secret est accablante. Mais c’est à l’aide de son vide silencieux que le nouveau venu comprendra et expliquera les choses et les êtres. Le Guide simplifie l’imperceptible en apprenant à son compagnon que le message de ce décor ne s’aperçoit que par une méditation purifiée. La maîtrise des pulsions et des émotions constitue la marque de cette étape de l’initiation. Le futur prêtre apprend à voir au-delà des choses et des êtres.
Le Guide :
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- Ô profane, Lètè-Yèkou te parle : Ce que tu ne sais pas, c’est que les aveugles dans la nuit voient. Ils regardent les pénombres et ils voient la Nuit.
- Quand le cœur se couvre d’obscurité, l’esprit conçoit et enfante la lumière.
- Chaque fois que tu te souviens ou racontes ces moments essentiels de ta vie sacerdotale, adresse une supplication aux ancêtres.
- Qu’ils nous pardonnent notre témérité. Nous n’avons pas pu garder le secret de peur que l’oubli n’emporte l’œuvre et que l’ignorance n’avale nos enfants.
- Mais qu’ils soient apaisés. Nous n’avons pas livré la Nuit à l’holocauste.
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- Sache- le, les légendes chargées de fantasmes humains et d’extases divines ne sont pas que fables et hallucinations.
- Elles fixent dans les parois de la mémoire le contenu de l’âme vouée à la vie éternelle.
- Celui qui t’a amené ici souhaite ton éveil à la Grande Révélation, à celle que l’Histoire n’a pas pu amplifier, à celle qui est dite dans les lieux secrets depuis toujours.
- C’est l’alpha. C’est l’oméga. C’est la tranche de vérité cachée au monde.
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- Descends maintenant avec moi. Puisque ta curiosité est pure, ne crains pas.
- À cette heure que tu manifestes virtuosité, force et respect, le sacré te pénètre. Ne crains pas.
- Voici le lieu où s’inaugure ta démarche. Regarde-le.
- Tout vide et tout neutre, il contient le symbole qui embaumera ta volonté.
- Cet univers ne perd pas le langage de la Vie.
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- Dans cette ombre pesante, regarde le chapelet de coques, de lui vient la Lumière quand on sait voir. On l’appelle Okpèlè.
- Ouvre les yeux.
- Ce décor trace la tragédie de l’âme.
- Les maîtres l’appellent l’ombre de la Vérité, Oyè, ou la Toile.
- S’il te plaît, réfléchis à la langue que je parle. C’est la langue des dieux.
- Elle éclaire des valeurs.
- Amour, volonté, sacrifice, péché, pénitence… sont des valeurs essentielles.
- La vie nous l’apprend. Notre conscience les rejette. La Vérité nous les ramène sans cesse.
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- Perçois ce son. Tu le distingues du silence de ce lieu.
- Mais pourquoi ne distingues-tu pas la réalité de l’illusion ?
- Voici l’épreuve. Réfléchis sans cesse.
- Ne résiste pas à l’ivresse de la Vertu.
- Dans la Vérité, évite les souillures.
- « Crains le monde. Réserve-lui la meilleure part pour que le vent n’emporte pas tes œuvres » a dit Gbé-Fu.
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- Voici la porte de la Connaissance où règnent nos Ancêtres.
- Bientôt, les Esprits immortels libéreront la conscience maîtresse de la Vérité.
- Ils te débarrasseront de l’ignorance qui t’éloigne de toi-même.
- Bientôt, la lumière prendra possession de ces lieux, le Ciel balayera les ténèbres et tu verras la glorieuse kabbale qui t’éveillera à la sensibilité collective.
- Quand tes yeux s’ouvriront, tâche de te l’enseigner : tes appréhensions proviennent des rayons divins que la Lumière répand sur ta vie, ce qu’aveugle tu ne vois pas.
